Gaetano CIARCIA, sur les sentiers de la mémoire guadeloupéenne…

De l’histoire à la mémoire, la Guadeloupe est pour l’anthropologue Gaetano Ciarcia, « une île d’histoire, traversée par des mouvements du passé et des flux qui se passent dans le présent ». Il est venu rencontrer les étudiants de la Classe préparatoire aux grandes écoles littéraires (CPGE A/L 1) du lycée Gerville Réache.

Gaetano Ciarcia devant les étudiants de la classe d’hypokhâgne du Lycée Gerville Réache. Crédits photo : Gilles Delâtre

Jeudi 4 février, les étudiants de la classe préparatoire littéraire du lycée Gerville-Réache, et leur professeur d’histoire, M. Gilles Delâtre, ont eu le plaisir de recevoir l’anthropologue Gaetano Ciarcia, directeur de recherche au CNRS à l’Institut des mondes africains, qui effectue chaque année, depuis quatre ans, une mission d’étude en Guadeloupe dans le cadre de ses recherches sur la mémoire de l’esclavage.

A la découverte de l’anthropologie …

L’anthropologie sociale et culturelle est une science qui étudie les hommes en société et les échanges entre les individus, explique le chercheur.

Le métier d’anthropologue est synonyme d’échanges plus que de voyages. Cette science, à la fois sociale et humaine, est une occasion pour ses adeptes de « se déplacer et se rendre dans d’autres espaces, de vivre et de fréquenter de manière assidue les populations sur place ».

La démarche anthropologique s’appuie sur la rencontre avec la population, la participation à leurs activités quotidiennes. Nous retiendrons, au regard de l’expression de Nicolas Bouvier que le voyage « fait et défait ». La rencontre avec l’Autre, est une occasion de faire l’expérience de l’altérité et de se découvrir.

La rencontre de l’Autre ou « Comment peut-on être Persan ? »

La notion d’exotisme a été l’objet d’un des séminaires de Gaetano Ciarcia. L’exotisme est un objet de fabrication de l’altérité. C’est « l’énergie, la force, l’inclinaison de s’imaginer différent par rapport à l’autre … se fabriquer autre et fabriquer l’Autre ».

Le pays dogon au Mali avec sa fascinante cosmogonie et cette forteresse naturelle que constitue les falaises de Bandiagara aux habitats troglodytiques a été au cœur d’un processus de fabrication-invention d’un récit prétendument véridique et réaliste, par l’anthropologue Marcel Griaule, et l’ethnographe et cinéaste Jean Rouch.

Gaetano Ciarcia donne une conférence sur les Dogons aux étudiants de deuxième année (khâgne) dans le cadre de la question d’histoire au concours de l’Ecole Normale Supérieure. Crédits photo : Gilles Delâtre

Mémoire de l’esclavage en Guadeloupe

Gaetano Ciarcia rend compte ensuite de ses travaux en cours. Depuis des années il se consacre à la mémoire de l’esclavage. Après avoir enquêté au Bénin et en Martinique puis dans les villes de Bordeaux et de Nantes qui furent des « ports négriers », il porte depuis quatre ans son intérêt sur la Guadeloupe.

Consultant archives, organes de presse, musées, allant à la rencontre d’associations mémorielles mais aussi des jeunes générations, il essaie d’évaluer ce qu’est ici la mémoire de l’esclavage, le ressenti et les représentations, le patrimoine et les commémorations.

Comme, à son plus grand bonheur, la recherche est toujours infinie, Gaetano Ciarcia sera de retour dans notre archipel dès le mois de mai…

Article d’Enide FANCHONE, CPGE AL 1


Gaetano Ciarcia est l’auteur des livres De la mémoire ethnographique. L’exotisme du pays dogon (Éditions de l’EHESS, « Les Cahiers de l’Homme », 2003) et Le revers de l’oubli. Mémoires et commémorations de l’esclavage au Bénin (Karthala/Ciresc, « Esclavages », 2016). Il a également réalisé, avec Jean-Christophe Monferran, le film documentaire Mémoire promise (CNRS Images, 2014).